Par Kennedy Muhindo Wema
Tout voyage par avion et la traversée d’une frontière en RDC sont conditionnés par une obligation de passer un test Covid-19. Aucun passager ne peut esquiver cet exercice. A Kinshasa la capitale, il y a plusieurs centres de tests dont certains privés autorisés par l’INRB (Institut national des recherches biomédicales). Généralement c’est dans les grandes villes, proches de frontières où à forte mobilité des personnes vers une frontière proche que ce test est appliqué. Egalement dans les villes qui sont reliées entre elles par avion comme Kisangani, Bunia, Lubumbashi ou Mbuji-Mayi.
Dans la pandémie de Covid-19, les régimes frontaliers sont devenus des régimes de Covid-19 testing trèscomplexes et diversifiés. Quand je suis arrivé à Kasindi, j’ai été frappé par la manière dont les tests sont effectués ici. Kasindi est l’une des villes frontalières très actives avec des activités commerciales importantes entre l’Ouganda et la RDC. Dans les bâtiments de la douane, les policiers sont là et les agents des services d’immigration dans leurs routines habituelles mais si vous présentez votre document des résultats de Covid-19 Test, l’agents commis à la vérification n’a pas besoin ni de vous regarder à face encore moins de vous demander votre identité. Il sort son téléphone et scanne le code QR et obtient ainsi toutes les informations vous concernant.
L’agent m’en explique cette soirée de mardi:
« J’ai expliqué à tout le monde que Goma est le centre du pays… Vous voyez, ils ont mis le code QR et nous ici on sait le lire »,
Juste cela et vous traversez pour la RDC avant d’obtenir votre visa d’entrée au pays. Mais tous les tests de Covid-19 faits au Nord Kivu n’ont pas encore le code QR. Seuls les laboratoires de Goma et de Kasindi utilisent ce code de sûreté et en ont la capacité de les décoder ensuite. L’originalité à Kasindi par rapport à Goma (chef-lieu du Nord Kivu et fait face avec la ville rwandaise de Rubavu) est que pour faire un test PCR, vous avez seulement 2 heures d’attente pour avoir votre résultat. Pas question d’une lourde bureaucratie d’attendre 24 heures, 48 heures ou plus comme dans certains autres centres de prélèvement au Nord Kivu. A Beni il faut 48 heures, à Butembo et Goma un minimum de 24 heures d’attente. A Kasindi, en dehors de l’allègement lié au temps d’attente, il y a cette exception de taille : votre résultat de test Covid-19 porte votre photo d’identité. Ce que tous les autres centres de l’Est en RDC n’ont pas réussi à faire ces jours. Dans la procédure, lorsque vous faite votre prélèvement vous êtes photographié à l’aide d’un téléphone mobile. Votre image est associée à votre échantillon prélevé et apparaitra sur les résultats de votre test. Cette mesure, nous a-t-on expliqué vise à lutter contre toute tentative de tricherie. Si par ruse, un voyageur s’approprie le résultant encore valide d’un d’un ami ou d’un familier, la photo le trahira.
Des efforts des privés et non de l’Etat
La facilité au poste frontalier de Kasindi est le résultat des efforts des opérateurs congolais privés. En effet, au début de la pandémie, les voyageurs enduraient un calvaire sans nom. Plusieurs personnes interrogées à Kasindi nous ont témoigné qu’il fallait traverser la frontière, sans aucun document migratoire, juste pour aller passer le test Covid-19 en Ouganda. Il n’y avait aucun dispositif de prélèvement ni de test côté congolais. Le laboratoire le plus proche se trouvait à Goma (plus de 500 km de Kasindi dans la même province). Pour passer son test en Ouganda, la procédure coûtait très chère. Jusqu’ 70 dollars le test. Ensuite il fallait attendre parfois jusqu’à 2 semaines d’une longue bureaucratie pour accéder à fin à son résultat car les échantillons étaient envoyés à Kampala.
Il est également intéressant de noter qu’il a fallu des efforts d’un opérateur privé et non de l’Etat, pour qu’un dispositif de test soit mis en place, pour une frontière très sollicitée car étant le seul passage pour les Congolais qui se rendent non seulement en Ouganda mais aussi en Tanzanie, au Kenya et dans les pays d’Asie. Un partenariat public privé qui a allégé la tâche des voyageurs.
Un agent commis au laboratoire nous a expliqué:
« Un homme d’affaire a approché le service du PNHF (programme national d’hygiène aux frontières) et a proposé acheter ses équipements avec ses fonds propres. Un partenariat public-privé a été conclu et jusqu’à ces jours, l’investisseur continue à renforcer ses équipements. Voilà pourquoi on n’a jamais été débordé, on rend les résultats sûrs et en temps »
La leçon est que les privés animés de bonne volonté peuvent appuyer un Etat lorsque les moyens ne sont pas disponibles et ainsi alléger les souffrances des populations dans les frontières éloignées des centres de décisions. Toute fois la difficulté de traverser demeure dans le coût du visa. Avant, les habitants de Kasindi avaient le droit d’aller en Ouganda jusqu’à 25Km, juste avec la carte d’identité, sans payer un quelconque visa. La même chose avec les Ougandais vivant dans la ville de Bwera Custom. Ils avaient le droit d’entrer jusqu’à 25 Km sur le territoire congolais sans visa. Mais depuis que on a mis le test obligatoire, ce droit a été retiré à tous les citoyens des deux pays. Avec le test de Covid-19 il y a une obligation d’acheter un document migratoire (si vous n’avez pas de passeport) et de payer forcément donc le Visa.Or, sociologiquement, les habitant de Kasindi ont leurs frères de l’autre côté Ouganda, juste à face. Même les denrées de première nécessité et les produits manufacturés sont importés directement par les petits commerçants congolais dans la cité frontalière de Bwera.
Des prix different
Comparativement à Goma, (une grande ville frontalière de plus de 1 million d’habitants et chef lieux de la province du Nord Kivu) où l’essentiel du service du test Covid-19 est entre les mains des autorités publiques, il y a lieu de dire que les frontières ne sont pas les mêmes. La ville a 3 centres de prélèvement des échantillons et dans les 3 centres, bien que publiques, les prix sont différents. A la grande barrière d’entré en RDC ainsi qu’à l’aéroport de Goma vous devez payer 45 dollars américains alors qu’au laboratoire situé à la banque du sang, le coût du même test est à 40 dollars. Pourtant dans les autres villes de la RDC, de Kinshasa à Bunia, en passant par Kisangani, le prix du test est de 30 dollars. Et on croirait que c’est le standard. Même à Kasindi, les deux derniers mois le prix est passé de 40 à 30 dollars américains. Et ce n’est pas tout. Si vous devez traverser la frontière de la RDC vers le Rwanda à partir de Goma, la bureaucratie vous fera tout rater. D’abord vous devez vous assurer d’avoir fait votre test dans un des centres de prélèvement de la ville de Goma. A la grande barrière, les tests réalisés dans les autres villes du pays, même celui de Kasindi, sont systématiquement invalidés par les agents de l’hygiène aux frontières. Même le contrôle du QR n’est pas effectué ici : vous devez avoir les résultats d’un test fait à Goma. La dernière différence est qu’à l’arrivé à Goma, tout voyageur à l’entré à l’aéroport, débarquant d’un vol international, doit passer un nouveau test appelé test à l’arrivé. Vous déboursez 45 USD au prélèvement mais sans vous assurer que vous aurez le résultat qu’on vous promet être disponible le lendemain à 14 heures. Le laboratoire de Kasindi qui appartient à un privé travaillant en partenariat avec l’Etat ne fait pas subir ces tracas de bureaucratie et accepte tout autre test effectué ailleurs. Tout cela à un prix le moins cher dans toute la province du Nord Kivu. En plus, Vous avez votre résultat dans un temps record dans un format sécurisé par un QR et votre photo.
Diversité des régimes de testing
Pour les voyageurs qui circulent à l’intérieurs de la RDC, uniquement par avion, les voyageurs par autres moyens de déplacement n’étant pas soumis au test Covid, il faut s’assurer de respecter les mesures utiles, avant le voyage, en tenant compte des contraintes liées :
- Au temps : le temps entre le prélèvement des échantillons et la livraison de résultats dépends d’une ville à une autre.
- Au coût du test : le prix des tests n’est pas uniforme d’un centre de test à une autres.
- A la validité du test : La règlementation nationale veut que le test soit valide de 14 jours mais cette règle dépend d’un espace géographique à un autre dans le même pays. Entre Kinshasa la capitale et l’intérieure du pays, cela ne pose pas problème. Seulement entre les différentes villes de l’intérieure, par exemple entre Kisangani et Goma deux chefs-lieux deux provinces différentes. Après 7 jours, votre test devient périmé, il faut en faire un autre. Surtout si vous partez de Goma ou les règles changent encore. De 14 jours reconnus par l’admiration du ministère de la santé, la validité du test passe à 7 jours, sans explication. Donc 7 jours après, vous devez refaire le test pour quitter Goma alors qu’ailleurs la validité de 14 jours est respectée. Pire, si vous avez traversé une frontière et voulez revenir à Goma, la validité du test passe de 14 jours règlementaires à 3 jours seulement.
Pour les voyageurs internationaux qui doivent quitter la RDC par Goma, que ça soit par avion ou par une frontière terrestre, il faut avoir les nerfs solides. Et finalement, à cette époque des nouvelles technologies, les résultats des tests sont remis à la main. Vous devez aller les retirer au bureau local de l’IRNB et minimum 24 heures près le prélèvement avec la fatidique phrase : « résultats demain à 14 heures ». Ne demandez pas d’explication, c’est la règle. A Kasindi par ailleurs ce n’est pas le cas. C’est plus facile. Vous avez maximum 2 heures pour avoir votre résultat qui ne sera remis en cause nulle part et pour traverser une frontière avec la RDC et même dans les villes internes du pays.