Kennedy Muhindo Wema
Au Nord Kivu, la pandémie de Covid-19 est embrouillée avec l’histoire des épidémies d’Ebola. A Beni – une hot spot de l’épidémie d’Ebola de 2018 à 2020 – les malades de la Covid-19 traités en quarantaines reçoivent les soins dans l’ancien centre de traitement de la maladie à Virus Ebola à l’hôpital général de Beni. Cette situation est la résultante du fait que, contrairement au reste du pays, la pandémie à Covid-19 a été déclarée dans la zone au lendemain de l’éradication de la 10èmeépidémie de la maladie à virus Ebola. Il n’y avait pas d’autre infrastructure pour interner les malades de la Covid-19. Le CTE (centre de traitement Ebola) était vide et désaffecté. Les autorités sanitaires ont donc profité de ces installations pour affecter une partie au traitement les malades positifs à la Covid-19. Ebola a donc servi Covid-19 en lui offrant non seulement des infrastructures mais aussi du personnel formé dans la lutte contre les épidémies. Certes, ce personnel a vite bénéficié d’une prise en charge par une ONG internationale.
Cependant, au cours de la réponse à la pandémie de Covid-19 les prestataires ont également été rapidement désillusionné. Ils se sont vus abandonnés lorsque Ebola a resurgit en Equateur – le 11ème épidémie de Ebola au RDC – quelques mois seulement après la déclaration de la Covid-19. L’ONG est partie secourir les équipes de la riposte contre Ebola à l’autre bout du Congo, laissant derrière elle les prestataires de la riposte contre la Covid-19 de Beni que, malheureusement l’Etat congolais n’a pas réussi à satisfaire. Les primes ont subitement été coupés. Même certains intrants de laboratoire ont connu des ruptures. „Depuis qu’ils sont partis, je n’ai plus jamais été payé. Je n’aime pas qu’on me parle même de prise en charge car je suis devenu bénévole or je travaille dans des conditions à hauts risques, exposé à la contamination… “ nous a expliqué un agent.
L’ONG internationale est ensuite revenue à Beni lors de la 13èmeépidémie d’Ebola mais n’a pas repris sa prise en charge dans la riposte contre la Covid-19 bien que le centre de traitement Covid-19 et le centre de traitement Ebola étaient dans le même enclos. Quelques agents travaillant pour la laboratoire INRB (Institut nationale de recherche biomédicale) et qui s’occupent des tests Covid-19 nous ont confirmé avoir été pris en charge en terme des primes de risque par une ONG internationale qui avait travaillé activement dans la riposte. Les autres agents sont abandonnés par les autorités politiques et administratives et sans une politique de prise en charge.
La riposte contre la Covid-19 a plutôt bénéficié des reliquats de la 10ème épidémie à virus Ebola que d’en tirer des leçons. Que ça soit le personnel soignant, les infrastructures d’accueil et de soin, les instruments de laboratoire ainsi que les ressources humaines y affectés, tous sont un héritage de la riposte contre la 10èmeépidémie de la maladie à virus Ebola.
Ebola business contrarie Covid-19 parent pauvre
La Covid-19 est arrivé comme un parent pauvre. Aucun investissement du pouvoir public ni des ONGs en grande échelle. Si pour Ebola les ONGs internationales et les agences de nations unies avaient investie d’énormes moyens pour éradiquer l’épidémie, la riposte contre la Covid-19 est un parent pauvre. Plusieurs personnes impliquées dans la lutte nous ont déclaré n’avoir pas été payées depuis le début de la pandémie. Là les primes impayés comme pour la vaccination, ailleurs des salaires qui n’arrivent pas pour les prestataires, et pire, les agents commis sont dans leurs fonctions habituelles et cumulent avec le traitement des malades Covid-19. “ Nous avons participé à l’administration du vaccin astrazeneka mais jusqu’à ce moment – Octobre 2021 – nous n’avons jamais été payé ces prestations. Or nous avons recouru aux techniques acquises lors de la vaccination contre Ebola en 2018„, nous affirmé un infirmier d’un centre de santé. Même des simples formations pour s’adapter à la Covid-19, il n’y en a pas eu ou presque pas. Des conducteurs taxi moto qui avaient été fortement impliqués dans la lutte contre Ebola nous ont témoigné n’avoir jamais été formés clairement contre la Covid-19. „Nous écoutons tous cela à la radio, comme tout le monde. Jamais ne on nous a rassemblés pour nous expliquer mais nous prenons des précautions en respectant les mesures barrières„, expliquent-ils. La riposte contre la Covid-19 peine vraiment à se prendre en charge.
Pas d’intrant des tests dans les centre de santé de Beni
Du côté des dépistages de la Covid-19, il n’est pas appliqué dans les centres de santé de Beni ville et territoire. Il n’y a pas d’intrants disponibles pour les centres de santé. Un laborantin nous affirmé qu’il n’en a pas connaissance. « Je peux facilement réaliser un test mais comment le ferai je car il n’y a pas d’intrants. On prélève puis on achemine les échantillons à l’hôpital général –où se trouve le laboratoire IRNB- pour le test », explique-t-il. Cette affirmation nous a été aussi faite par quelques infirmiers des centres de santé. La pénurie des intrants pour le test est réelle. Un autre intervenant dans la riposte contre la Covid-19 nous a affirmé qu’il arrive souvent qu’il ait rupture de stock.
La situation est difficile pour la riposte contre la pandémie de Covid-19. Pourtant, le Nord Kivu était mieux préparé pour lutter contre la pandémie de la Covid-19, arrivée au lendemain de la victoire contre la 10èmeépidémie à virus Ebola. Si les populations ont vite intériorisé et adopté les mesures barrières contre la pandémie, en se basant sur les acquis de la riposte contre Ebola, le pouvoir public n’a pas suivi la cadence. La riposte contre la Covid-19 est un parent pauvre qui souffre d’un manque criant des ressources humaines. Pourtant les bras expérimentés sont là, disponibles, formés lors de la riposte contre Ebola, mais les moyens financiers sont presque inexistants.